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Pyramides, de Romain Benassaya

2018 - science-fiction

 
Couverture de l'édition poche du roman Dracula de Bram Stoker

Quatrième de couverture


2182. A bord d'arches géantes, les humains fuient une Terre sur le déclin. Leur destination ? Sinisyys, une autre planète bleue découverte aux confins du système Eridani. Parmi ceux qui rêvent de la rejoindre, Eric et Johanna. Or, après avoir émergé du sommeil cryogénique, ils comprennent qu'ils n'ont pas atteint Sinisyys mais une structure artificielle si grande que l'esprit humain ne réussit même pas à en imaginer les limites. Où sont-ils ? Comment sont-ils arrivés là ? Eric, Johanna, et les autres colons, parviendront-ils à percer le mystère de l'artéfact labyrinthique puis à faire repartir le Stern III vers sa destination initiale ? Pour cet échantillon d'humanité au bord de l'extinction, débute alors un compte à rebours au final incertain !


 

Mon avis


Intrigue : 4/5


En 2182, 1600 passagers quittent la Terre à bord du vaisseau Stern III, endormis pour une nuit de 200 ans vers la planète Sinisyys. Problème : à leur réveil, ils réalisent qu'ils ne sont pas arrivés à destination… ni même encore dans l'espace interstellaire.


Dès lors, parmi les passagers, deux courants de pensée vont s'opposer. D'un côté, les Explorateurs, qui n'ont qu'une idée en tête : découvrir où le Stern III est échoué et tenter de sortir de cet endroit mystérieux. De l'autre, les Bâtisseurs, qui se considèrent devant le fait accompli de devoir vivre dans cet environnement étonnant, et qui privilégient le développement d'un cadre de vie le plus agréable possible avec la construction d'une ville.


Le rythme du roman est assez soutenu malgré ses plus de 600 pages.

Nous avons affaire à un récit d'aventures, empli de découvertes et de retournements de situations. On ne s'ennuie pas.

J'ai été autant tenu en haleine que lors de ma lecture précédente, l'excellent Dark Matter, un roman clairement identifié dans le genre thriller, contrairement à ce Pyramides qui en aurait toute légitimité.


Seul bémol : les ficelles sont parfois grosses, à cause du parti pris de l'auteur de tout expliquer et détailler, en n'appliquant que très rarement le show don't tell, comme nous en reparlerons dans la section "Style" un peu plus bas.


Idées : 4/5


Le roman regorge d'idées intéressantes.


Celle du Jardin pour commencer, et ses Jardiniers, des pucerons génétiquement modifiés ayant évolué en scarabées intelligents. On y retrouve un petit côté des Fourmis de Bernard Werber, reprenant le thème de l'humain essayant de communiquer avec l'animal, celui-ci ayant la particularité d'évoluer et d'apprendre très vite.


Sans en dévoiler trop, l'idée du Tunnel est bien entendu centrale. Je regrette juste qu'elle ne soit jamais éclaircie, ce qui rend la fin du roman très frustrante à mon goût.

Il est d'ailleurs à noter que ce roman est souvent présenté comme appartenant au genre space opera, une idée renforcée par la couverture très trompeuse, mais il n'en est rien. Tout du moins, nous sommes vraiment très éloignés des codes du genre. Ici, nous sommes plus proche d'un planet opera, ou, plus précisément, d'un tunnel opera... un nouveau genre à part qu'aurait inventé l'auteur. Par exemple, nous sommes très éloigné de l'excellent space opera / planet opera Aurora.


Enfin, j'ai trouvé excellent l'idée d'Influenza, dont je ne dirai rien de plus pour ne pas spoiler.


Par contre, il est à noter nous sommes à l'opposé de la hard SF, en ce sens qu'aucun concept théorique n'est expliqué (comme celui du Tunnel), et les données scientifiques sont assez légères. Ce parti pris rend la lecture très accessible, mais des lecteurs SF chevronnés pourront rester sur leur faim. D'autant plus qu'il est tout à fait possible de combiner plaisir de lecture et notion scientifiques élaborées, comme le prouve le génial Projet Dernière Chance d'Andy Weir.

Certaines notions classiques en SF me semblent même dévoyées. Par exemple, l'auteur évoque du "matériel de terraformation", qui s'apparente plus à des engins de chantier BTP taille XXL plutôt qu'à des machines visant à modifier l'atmosphère d'une planète, sa température ou sa biosphère, afin de les rapprocher de celles de la Terre.


Personnages : 4/5


Dans l'ensemble, les personnages sont bien campés.


Eric, le personnage principal, est assez "Monsieur tout-le-monde", ce qui le rend très accessible et l'on s'identifie rapidement à lui. Son seul trait marqué est sa volonté d'explorer le Tunnel, une volonté sans doute partagée par nombre de lecteurs avides de découvertes, ce qui renforce l'empathie que l'on éprouve à son égard.


A l'inverse, le personnage de Johanna, bien décidée à se concentrer sur la survie et non l'exploration, sombre peu à peu dans le côté obscur. J'ai trouvé que c'était bien amené. Pourtant, au début du roman, nous ne pouvons que l'aimer si l'on considère sa volonté de communiquer avec les Jardiniers.

Bref, il s'agit sans doute du personnage le plus nuancé et le plus marquant. Vers la fin, on adore la détester.


Les autres personnages sont plus ou moins dans l'ombre de ces deux premiers, comme le docteur Henri, le commandant Samuel ou l'ingénieure Jia. Tous servent cependant à faire avancer l'intrigue avec brio.


Style : 2.5/5


Le gros bémol du roman selon moi.


Le style n'est pas mauvais en soi, disons juste que ce n'est pas le point fort de l'auteur. C'est très scolaire, très "premier roman", bien que Pyramides soit le deuxième de l'auteur. Ce dernier n'applique que très rarement le show don't tell, plus exigeant pour le lecteur, mais tellement plus immersif lorsqu'il est employé finement. L'avantage, me direz-vous, c'est qu'on n'est jamais perdus et que l'intrigue est limpide, et vous aurez raison.


Par ailleurs, l'auteur abuse à outrance des virgules avant "et", sachant qu'elle doit normalement être exclue sauf en cas de coordination de différentes phrases (par exemple : "Il mangea la pomme, et elle dégusta la poire.") C'est une erreur qu'il m'arrive de faire moi-même (par exemple pour couper une phrase longue) et, on est d'accord, c'est un détail, mais un détail qui m'a, personnellement, suffisamment agacé pour que je le souligne ici.

Un exemple concret, p. 405 : "Malaïka Lyons siégeait à sa droite, Henri Juno à sa gauche. Chani Damayanti, et Obéron Keyras leur faisaient face." Mais pourquoi diable cette dernière virgule ?! (désolé pour la double ponctuation, mais j'ai trouvé ça franchement exaspérant à force). A part faire buter le lecteur et nuire à la fluidité du texte, elle ne sert à pas à grand chose...


En bref :

Un roman palpitant qu'on lit sans s'ennuyer. Le style perfectible est compensé par le foisonnement d'idées fascinantes, bien qu'elles aient tendance à nous laisser sur notre faim.


NOTE GLOBALE : 4/5


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